Entre Défis Locaux et Solutions Globales : L'Agenda Blockchain de l'Afrique Francophone


Date : 14 juin 2025
Heure : 16h00 (UTC) / 18h00 (Goma)
Modérateur : Boaz
Participants : Représentants du Congo (RDC), Burkina Faso, Cameroun


Ouverture et contexte de la réunion

L’ouverture de la réunion a rappelé la mission de la communauté Cardano francophone qui consiste à faciliter les discussions en français sur les questions liées à la blockchain et à maintenir une cohésion communautaire permettant de ne manquer aucune information importante de la communauté globale Cardano. La communauté réunit actuellement des pays francophones avec une représentation de la République démocratique du Congo, principalement Goma, du Burkina Faso avec Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, ainsi que la Côte d’Ivoire. L’ouverture internationale de la communauté est illustrée par la participation de membres résidant en Europe, comme Chanceline, membre camerounaise établie en Italie.

La réunion s’est déroulée avec douze participants, suivant le format habituel des sessions hebdomadaires organisées chaque samedi à la même heure. L’ordre du jour comprenait un rappel de la réunion précédente, une mise à jour sur les activités d’Intersect MBO, suivi d’une discussion sur les problèmes identifiés dans les communautés africaines et les solutions blockchain envisageables.

Rappel de la séance précédente

Un bref résumé de la session du 7 juin a été présenté. Cette session portait sur la blockchain africaine et son développement par la communauté Cardano pour incarner la philosophie africaine. Les discussions avaient permis d’identifier plusieurs problèmes majeurs dans les régions représentées, notamment les difficultés financières à Goma avec la fermeture des banques et les dysfonctionnements des services Mobile Money, les questions de sécurité au Burkina Faso liées au financement du terrorisme, les problèmes d’archivage des données étudiantes, et l’inaccessibilité des dossiers médicaux. Les solutions proposées incluaient l’intégration des stablecoins, la surveillance en temps réel des transferts suspects, et la création d’historiques médicaux sécurisés sur blockchain. Les principaux obstacles identifiés demeurent l’aspect trop technique des formations actuelles, la réticence gouvernementale à la transparence, et le manque de développeurs blockchain francophones dans la communauté.

Mise à jour des activités Intersect

Les dernières actualités d’Intersect, l’organisation basée sur les membres de Cardano, ont été présentées. L’info action récemment approuvée a obtenu 63,66% d’approbation des DReps, 93,26% d’approbation des SPOs, et six membres sur sept du comité constitutionnel ont voté favorablement. Cette approbation débloque le processus de retrait du trésor qui permettra le financement de trente-neuf projets soumis sous l’administration d’Intersect.

Une décision communautaire complexe a été prise suite à un sondage sur Ecclesia, où la communauté a choisi de procéder à trente-neuf retraits individuels du trésor plutôt qu’à un retrait unique consolidé. Bien que ce processus s’avère complexe, Intersect s’engage à le respecter. Les élections du comité constitutionnel ont débuté le 12 juin et se poursuivront jusqu’au 2 juillet, marquant un changement important avec le passage d’un système de vote basé sur les enjeux à un vote par les DReps.

Concernant les développements techniques, la plateforme GovTools a été révisée avec une nouvelle proposition modulaire offrant un modèle de financement ouvert à la communauté. Cet outil permet à quiconque de participer à la gouvernance sans nécessiter de connaissances techniques majeures.

Au niveau organisationnel, Nicolas Séni est devenu président du comité Civique avec un engagement vers plus de transparence et la communauté via le nouveau compte Intersect Civics. Il a également été noté la croissance continue des membres d’Intersect.

Participation des nouveaux membres et contributions

La réunion a accueilli quelques nouveaux participants, notamment un participant du territoire de Nyiragongo en République démocratique du Congo, une entité périphérique de Goma. Il a confirmé que les problèmes affectant Goma touchent directement tous les territoires périphériques de la province. Il a souligné que sa communauté rencontre les mêmes difficultés que celles identifiées par les membres pendant la séance précédente, mais sa connexion a été interrompue avant qu’il puisse développer davantage ses observations.

Une participante originaire de Goma, lauréate de la formation d’avril organisée par Goma Hub, a souligné l’importance de maximiser les formations sur la blockchain, particulièrement dans les domaines de la santé et bancaire. Elle a renforcé trois points majeurs soulevés lors des réunions précédentes, notamment le problème d’éducation, le manque de matériel et d’idées sur la blockchain dans les communautés locales, ainsi que les problèmes d’adoption et de réticence face à cette technologie.

Synthèse exhaustive des problèmes identifiés

Une synthèse complète des problèmes soulevés lors des réunions précédentes a été présentée, précisant que cette liste servirait de base pour les discussions futures sur les solutions. Il a été souligné que malgré les doublons possibles, cette récapitulation permettrait d’identifier les grandes lignes pour des solutions viables et acceptables.

Dans le domaine financier, la République démocratique du Congo, particulièrement Goma, fait face à des difficultés majeures de circulation monétaire dues à la fermeture des banques et aux dysfonctionnements récurrents des services d’argent mobile. Ces problèmes entraînent un manque de liquidités dans plusieurs villes importantes comme Goma, Bukavu et les grandes cités du Nord et Sud-Kivu à l’est du pays. Les opérateurs imposent des taux d’échange défavorables, et la volatilité des cryptomonnaies, initialement envisagées comme solution, constitue elle-même un problème. Les coûts élevés d’accès aux services blockchain, dus aux fluctuations du marché, compliquent davantage l’adoption. Les communautés font également face aux défis d’adoption des innovations blockchain face aux habitudes financières établies.

Les questions sécuritaires préoccupent particulièrement le Burkina Faso où le financement du terrorisme pose un défi majeur. L’absence de système adéquat de surveillance facilite ces transferts illicites, tandis que l’infiltration des villes par des groupes terroristes complique la situation sécuritaire. Les gouvernements éprouvent des difficultés à contrôler les flux financiers, ne sachant pas qui transfère quoi à qui, et doivent faire face aux limitations des virements bancaires traditionnels qui exigent des justificatifs pour les montants élevés.

Les problèmes d’archivage et de documentation touchent l’ensemble des communautés africaines représentées. Les systèmes d’archivage traditionnels montrent leurs défaillances avec des méthodes manuelles inefficaces de gestion des documents. La perte ou l’inaccessibilité des documents scolaires et administratifs, y compris les diplômes et certificats, pose des problèmes considérables pour les citoyens. L’organisation manuelle inefficace des archives et les vulnérabilités des données numériques centralisées exposent les informations importantes à des risques de perte ou de manipulation.

L’éducation et l’adoption de la blockchain rencontrent plusieurs obstacles significatifs. L’accès limité à l’éducation sur la blockchain constitue un frein majeur, malgré les efforts de traduction de documents pour les communautés locales. Les formations disponibles sont jugées trop techniques et inadaptées au grand public, alors que l’objectif serait d’adapter l’éducation blockchain à tous les niveaux de compréhension. Le manque de support pédagogique, la réticence des gouvernements et des entreprises, ainsi que les difficultés d’adoption liées au manque de préparation des organisations ralentissent considérablement le développement de l’écosystème blockchain local.

Introduction d’un nouveau défi : la fraude électorale

Un problème majeur commun à de nombreux pays africains a été introduit : la fraude électorale. Il a été souligné que ces sessions sont interactives et que chaque participant devrait contribuer à identifier les problèmes qui minent les sociétés africaines et pour lesquels aucune solution fiable n’a encore été trouvée.

Forte de son expérience dans la gouvernance Cardano et sa participation aux processus de vote de l’écosystème, cette participante considère que l’adoption du système de vote blockchain par les pays africains pourrait considérablement résoudre les problèmes de fraude électorale. Elle a décrit une situation malheureusement courante en Afrique où des dirigeants s’éternisent au pouvoir non pas par la volonté populaire mais grâce à des systèmes permettant de manipuler les résultats électoraux en leur faveur.

Citant l’exemple de nombreux pays africains, y compris le sien qu’elle préfère ne pas nommer pour éviter des complications, cette intervenante a illustré la situation de populations qui naissent, grandissent et vieillissent sous le même président, non par choix démocratique mais par manipulation du processus électoral. Elle considère que la blockchain pourrait offrir une solution technique très fiable à ce problème politique majeur, à condition que les gouvernements acceptent de collaborer et qu’il y ait des personnes honnêtes à la tête des gouvernements, disposées à agir dans la transparence.

Le modérateur a réagi en soulignant les défis que représente l’adoption de cette technologie par des gouvernements habitués aux manigances, problème qui ne se limite pas à l’Afrique mais touche également d’autres régions du monde. Il a rappelé que la blockchain met tout à la vue de tous et ne permet aucune modification, ce qui explique peut-être la réticence des politiciens. Il a également mentionné que des votes sur blockchain ont déjà été testés dans plusieurs pays, notamment en Sierra Leone et dans certains pays d’Asie et d’Amérique, mais que ces projets n’ont jamais été poursuivis après la phase de test, possiblement à cause de cette transparence imposée.

Solutions éducatives et approche générationnelle

Une autre participante a proposé une approche éducative progressive ciblant les jeunes générations comme stratégie pour surmonter la résistance actuelle des autorités à l’innovation blockchain. Elle a suggéré que les influenceurs mondiaux pourraient intégrer les notions de blockchain dans les cursus universitaires ou dans l’enseignement secondaire, notamment à partir de la cinquième et sixième année. Cette approche s’appuie sur le principe que la mémoire des jeunes est plus fraîche et leur capacité d’adaptation aux nouvelles technologies plus importante que celle des adultes plus âgés.

Elle a expliqué que même si les gouvernements refusent actuellement d’accepter l’innovation blockchain à cause des problèmes de transparence qu’elle impose, une stratégie éducative à long terme pourrait porter ses fruits. En formant la base étudiante et universitaire, on créerait un réservoir de compétences qui faciliterait l’adoption rapide de la blockchain en Afrique lorsque les autorités politiques seront prêtes à l’accepter. Elle a souligné que cette approche constitue une mesure palliative importante pour contribuer au développement de l’écosystème blockchain africain.

Une autre participante a renforcé cette proposition en suggérant des démarches concrètes auprès des responsables d’universités et d’écoles secondaires pour leur démontrer l’importance de la technologie blockchain pour l’avenir. Elle a proposé de collaborer avec les professeurs d’informatique et de technologie pour intégrer ces enseignements et motiver la jeunesse. Selon elle, cette approche permettrait aux jeunes d’acquérir l’envie de se documenter personnellement, même en ligne, et d’assurer la continuité communautaire pour les générations futures.

Elle a insisté sur le fait qu’il ne faut pas se limiter à considérer les bénéfices immédiats mais plutôt investir dans l’éducation par passion pour la technologie et la communauté. Elle considère que si la génération actuelle ne trouve pas le moyen d’appliquer ces technologies, la génération suivante pourra en tirer profit grâce à une éducation constante et régulière sur ces sujets.

Partenariats universitaires et stratégies institutionnelles

En reponse a cette approche, la responsable de Inkuba Hub a détaillé les efforts d’Inkuba Hub au Burkina Faso pour établir des partenariats universitaires concrets. Un accord existe déjà avec une 'Université à Bobo Dioulasso, offrant la possibilité d’organiser des sessions de formation gratuites en blockchain, bien que cette initiative ne soit pas encore pleinement déployée au niveau institutionnel. Des négociations sont en cours avec d’autres institutions pour développer des partenariats similaires et intégrer progressivement des ateliers blockchain dans les cursus académiques.

Cette approche s’inscrit dans un projet plus large qui avait été soumis pour financement mais qui n’a malheureusement pas été retenu lors des votes communautaires. Ce projet visait à établir des partenariats dans différentes universités des régions représentées par la communauté francophone, incluant la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Burkina Faso et la République démocratique du Congo. L’objectif était de créer un réseau d’éducation blockchain approfondie dans l’ensemble de l’espace francophone africain.

Elle a aussi souligné l’importance de cette stratégie éducative comme vision fondamentale d’Inkuba Hub, organisation qui a toujours valorisé l’éducation. Elle considère que la demande actuelle consiste à élever le niveau d’intervention en travaillant sur des partenariats institutionnels plutôt que de se limiter aux formations ponctuelles. Cette approche permettrait d’avoir un impact plus durable et plus profond sur les communautés étudiantes africaines.

Malgré l’absence de financement pour le projet initial, elle a encouragé les autres hubs représentés, notamment celui de Goma et les futurs partenaires de Côte d’Ivoire et du Cameroun, à développer des initiatives similaires. Elle a insisté sur le fait que la motivation ne devrait pas être financière mais guidée par la passion pour la technologie et le désir d’avoir un impact positif dans chaque communauté.

Activités locales et formation continue

Le modérateur et responsable de Goma Hub a mis en lumière les activités régulières de Goma Hub en République démocratique du Congo, qui organise mensuellement des initiations à la blockchain chaque fin de mois. Ces formations structurées ont déjà permis de former plusieurs cohortes de participants locaux. Cette approche locale démontre la faisabilité d’un système d’éducation blockchain décentralisé et adapté aux contextes spécifiques de chaque région.

L’exemple de Goma Hub illustre comment les communautés locales peuvent développer leurs propres capacités d’éducation et de sensibilisation sans attendre nécessairement des financements externes importants. Cette initiative locale s’avère cruciale pour créer un écosystème durable de compétences blockchain dans l’espace francophone africain.

Vision à long terme et engagement communautaire

La responsable de Inkuba Hub a conclu la réunion en soulignant la détermination de la communauté à poursuivre ses efforts malgré les défis rencontrés. Elle a particulièrement salué la participation active des femmes lors de cette session, notant que Rita et Edwige avaient pris la parole de manière remarquable, contrastant avec la tendance habituelle dans les milieux technologiques où les femmes restent souvent en arrière-plan pendant que les hommes dominent les discussions.

L’engagement historique de la communauté a été souligné avec sept années de présence continue dans l’écosystème Cardano depuis 2021, démontrant une persévérance remarquable dans le travail d’éducation et de développement communautaire. La responsable de Inkuba Hub a insisté sur le fait que ces efforts ne sont pas vains et que la communauté continuera à se battre jusqu’à attirer l’attention nécessaire pour faire entendre la voix francophone dans l’écosystème global.

L’objectif reste de transformer les idées discutées en solutions concrètes et financées pour un impact réel sur les communautés africaines. La stratégie consiste à continuer le travail d’éducation et de sensibilisation tout en développant les capacités techniques nécessaires pour implémenter les solutions blockchain adaptées aux défis locaux.

La communauté maintient sa vision collaborative où chaque hub régional développe ses propres initiatives tout en contribuant à l’effort collectif. Cette approche décentralisée reflète les principes mêmes de la blockchain et permet une adaptation fine aux contextes spécifiques de chaque région tout en maintenant la cohérence d’ensemble de la communauté francophone.

Informations pratiques et suivi

La prochaine réunion est programmée pour le samedi 21 juin 2025 à 16h00 UTC, suivant le format hebdomadaire établi. Les nouveaux participants peuvent accéder au groupe Telegram de la communauté pour consulter les rapports des réunions précédentes, écouter les enregistrements et participer aux échanges continus entre les sessions.

Un rappel important a été formulé concernant les attentes réalistes vis-à-vis de la blockchain : cette technologie n’est pas une solution magique à tous les problèmes et certaines difficultés nécessitent des solutions locales traditionnelles ou l’utilisation d’autres technologies complémentaires. Cette approche pragmatique guide les discussions communautaires vers des solutions réalistes et implémentables.

La réunion s’est terminée avec un membre de Inkuba Hub qui avait levé la main pour intervenir, illustrant l’engagement continu des participants et leur désir de contribuer activement aux discussions communautaires. Cette dynamique participative constitue la force principale de la communauté Cardano francophone et son principal atout pour développer des solutions blockchain adaptées aux réalités africaines.

X: @InkubaA
Discord: Laurentine F. Djatsa

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Thanks for sharing a detailed report.

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Thank you Nana Sarfo